Comment faire la chronique d'un roman
policier alors que l'on se penche habituellement très peu sur le genre ?
1) remercier la personne qui vous l'a
prêté (merci donc à C.) et reconnaître que vous n'avez pas boudé votre plaisir, consacrant même
une pleine après-midi à le terminer. Au passage, savourer la
satisfaction d'avoir découvert qui était le coupable avant sa révélation. On a
sa petite fierté...
2) veiller à placer votre curseur de
résumé de l'intrigue assez bas car vous connaissez votre tendance à trop en
dire.
3) entrer sur la pointe des pieds sachant
que vous avez affaire à une auteure qui est reconnue, appréciée et dont les
personnages sont récurrents donc fort familiers pour les inconditionnels.
4) vous lancer quand même
malgré l'étroitesse du chemin que vous vous autorisez. Trêve de pré-requis et
d'appréhensions, vous devez bien ce petit effort au genre que vous avez
sciemment boudé.
Les personnages pourraient se suffire à
eux-mêmes, sans histoire pour les animer, tant ils sont jubilatoires. On sent
la construction progressive aboutissant à un résultat très travaillé (limite un
peu trop à mon goût, j'aime assez quand un auteur m'accorde une part de gris,
de flou sur un personnage, me permettant d'en ajuster le contour). Il
n'empêche, c'est quand même savoureux :
Le commissaire Adamsberg, dont le charisme
est tel qu'il peut obtenir à peu près tout de son équipe, malgré (ou grâce à ?)
des méthodes d'investigation peu conventionnelles.
Son adjoint, le commandant Danglard, homme
érudit, devant sans cesse gérer ses penchants pour la bouteille et son
incapacité à dire non à Adamsberg ce qui l'entraine dans des situations
périlleuses.
Veyrenc, Béarnais comme Adamsberg, en
concurrence avec Danglard sur le plan de la culture, s'exprime en versifiant.
Le lieutenant Violette Retancourt, aussi
colossale qu'efficace, élément infaillible de l'équipe.
C'est une fort étrange histoire qui va
retenir le commissaire Adamsberg en Normandie, à Ordebec. Selon la vision de
Lina Vendermot, l'Armée Furieuse, une armée fantomatique et vengeresse
remontant à une légende du Moyen Age s'apprêterait à tuer ceux qu'elle a
désignés comme "saisis". L'un d'entre eux, un individu brutal et
détesté de tous a disparu depuis plusieurs jours mais le capitaine de gendarmerie
ne semble pas accorder d'importance à cette peur ancestrale. Désavoué par les
meurtres et accidents qui vont suivre, le fier capitaine doit passer le relais
à Adamsberg qui accepte cette enquête troublante, occasion inespérée de mettre
au vert un encombrant protégé, transfuge d'une autre enquête.
En effet, maitre de son art, Fred Vargas
réussit à tisser deux affaires ensemble (je n'y ai cependant pas trouvé un
intérêt comparable). La galerie de portraits des personnages du cru est assez
remarquable entre la fratrie Vendermot, à la fois rejetée et inquiétante, fragile
et géniale, le capitaine Emeri qui se drape dans le prestige de son ancêtre,
maréchal d'Empire, et la vieille Léone qui comprend tout...
Servi
par un univers onirique des plus réussis, ce "rompol" (acronyme cher
à Fred Vargas) se lit bien sûr pour son intrigue mais pas seulement, loin s'en
faut !
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