samedi 18 mai 2019

Le vent reprend ses tours de Sylvie Germain

Je pourrais lire Sylvie Germain rien que pour la beauté de son écriture. Des phrases qui me donnent envie de lire à voix haute, des mots choisis avec une telle justesse que j'en reste béate et me demande "mais c'est juste parfait ce passage, comment fait-elle pour trouver les mots qui conviennent exactement ?"

Ce n'est pas le premier roman que je lis d'elle, je n'ai jamais osé en chroniquer un seul car je me sens d'une maladresse terrible pour rendre compte non seulement de la finesse de son écriture mais aussi de l'intelligence de son propos. 

Lire un livre de Sylvie Germain, c'est entrer en subtilité. Avec son écriture discrète, poétique qui par moment tutoie le fantastique, Sylvie Germain nous emmène sur les pas de Nathan et Gavril et sur un chemin réflexif des plus intéressants.
Gavril (forme populaire de "Gabriel") est un saltimbanque,  un amoureux des mots et de la vie, marcheur et déambulateur, musicien-poète (il joue de "l'olifantastique" et du "poèmophone"), un merveilleux personnage de roman en tout cas. Nathan le rencontre par hasard, un jour de grand ennui, un jour ordinaire en fait pour ce garçon timide et bègue, à qui l'on s'adresse peu, même pas sa mère pour qui il est transparent et encombrant. Gavril, une figure fantasque et bienveillante qui extirpe Nathan de sa morosité, lui redonne l'assurance et l'affection dont il était privé. Mais Gavril a disparu et Nathan, devenu adulte, a repris sa vie mécanique et insipide.

A travers cette histoire d’amitié entre le poète et l'enfant, Sylvie Germain tisse des pistes de réflexion que chacun investira en fonction de sa sensibilité : de quoi se construit un individu ? quelle place la littérature, la poésie et plus généralement le langage ont-ils dans cette construction ? Comment être présent à soi-même quand on n'a pas été regardé ?

Un roman intelligent et fin servi par une écriture à la musicalité délicate, un très beau moment de lecture.