Elle est son obsession depuis des années. Il a retracé sa vie patiemment, parcourant les lieux qu'elle a occupés, enquêtant auprès des descendants de ceux qui l'ont connue mais cette relation fusionnelle au personnage a rendu l'écriture impossible. Seul un parti-pris formel assez radical a pu sauver l'auteur de cette "oppression" paralysante : une phrase correspond à une ligne ("pour respirer" nous avoue-t-il) donnant ainsi au roman la silhouette d'un poème. Poème, hommage à Charlotte Salomon, artiste peintre, morte à Auschwitz en 1943 à l'âge de 26 ans. De l'enfance jusqu'à son arrestation en France et l'issue fatale qui semble d'autant plus inéluctable qu'elle est alors enceinte, nous suivons le parcours courageux de cette jeune femme : sa résilience pour surmonter les suicides familiaux qui l'entourent et notamment celui de sa mère, sa volonté pour s'affirmer en tant qu'artiste alors que les nazis interdisent aux juifs, l' accès, entre autres, à la culture, son envie de vivre intensément son histoire d'amour avec Alfred, le professeur de chant.
Cette
histoire forte nous empoigne et ce, d'autant plus que l'auteur associe le lecteur à sa quête de Charlotte, intégrant dans le roman et
sans déroger à la forme choisie, des éléments de ses recherches. Un livre qui
donne envie de découvrir l'œuvre de cette artiste, œuvre dont les conditions de
création sont largement partagées dans le roman ("Une création au bord du précipice") : plusieurs dessins et
croquis d'inspiration autobiographique, intégrant textes et musique et réunis
sous le titre, Vie ? ou Théâtre ?, une
œuvre que Charlotte parvient à protéger et à transmettre comme un défi à son
destin. Défi ou ultime résilience ?
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