Le
parcours de Tess Lohan, depuis l'Irlande où elle est née et a passé les 25
premières années de sa vie, jusqu'à New York n'est pas celui d'une aventurière
comme sa traversée de l'Atlantique pourrait le laisser supposer. Il n'est pas
non plus vraiment significatif de la volonté des expatriés de se forger une vie
meilleure. C'est davantage pour rejoindre sa sœur Claire dont elle s'est
toujours sentie proche que Tess quitte, à l'été 1962, le domaine familial
d'Easterfield. Ce roman n'est donc pas le portrait d'une génération d'émigrants
mais bien une histoire singulière, au sens de "personnelle" qui
revendique même une forme de simplicité car Tess Lohan est une femme discrète
plutôt craintive qui ne souhaite rien d'autre que de se fondre dans la masse.
Orpheline de mère à 7 ans, elle a été marquée par une enfance passée dans la
crainte d'un père sévère et taciturne. C'est une femme à la solitude
intrinsèque, cordiale en apparence mais farouche dès qu'il s'agit de nouer des
liens plus profonds. Femme d'un seul amour, elle devient mère célibataire, situation
qui, dans le New York des années 60-70 est tolérée mais lui interdit le retour
en Irlande. Alors, elle se crée progressivement des points d'ancrage, l'amour
qu'elle porte à son fils, une amitié solide avec sa voisine, Willa, les gestes
routiniers de son métier d'infirmière mais aussi le goût pour les romans et la
poésie. Cependant, les non-dits pèsent sur sa relation avec son fils notamment
quand celui-ci entre dans l'adolescence. Ce roman propose une analyse assez
fine de la relation monoparentale quand celle-ci se délite sous le poids des
silences accumulés, quand l'ingratitude de l'adolescence, tel un boomerang, lui
reproche un amour jusque là exclusif. C'est donc un roman assez intimiste, au
rythme plutôt lent mais servi par une approche psychologique des personnages
subtile et sensible que nous propose Mary Costello avec Academy Street. Le
titre, selon moi, induit un peu en erreur le lecteur, pour autant, je reconnais
qu'il n'est pas facile d'en trouver un pour cet itinéraire de vie que je me
garderai bien de qualifier d'ordinaire, ce qui serait réducteur car tout portrait se distingue par sa singularité.
Ce n'est pas le premier commentaire enthousiaste que je lis sur ce livre. Le titre, dont tu soulignes d'ailleurs la maladresse, m'avait conduite à imaginer qu'il s'agissait d'un roman un peu mièvre... ce qui n'est visiblement pas du tout le cas.
RépondreSupprimerJe n'étais pas trop sûre de moi par rapport à la maladresse du titre mais ton propos me confirme que j'avais raison. En fait, Academy Street est tout simplement le nom de la rue où se situe son appartement à New York mais cela évoque davantage une histoire de lycéenne, je trouve alors qu'en fait l'essentiel du livre est consacré à sa vie d'adulte, plutôt rangée d'ailleurs.
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