jeudi 21 mai 2015

Le roi n'a pas sommeil de Cécile Coulon





Il est certes roi en son royaume, ce Thomas Hogan, mais il n'est guère doué pour l'amour et le bonheur en général. Le roman débute sur une scène où il est emmené, menotté et nous invite à faire le chemin en sens inverse pour comprendre comment il en est arrivé là. Son royaume, c'est une immense propriété familiale avec forêts et pistes où s'invitent les animaux, une propriété acquise par William, son père, grâce à un héritage mais qui a englouti son pécule. Pour entretenir ce domaine, William a été obligé de trimer comme un forçat, en cumulant deux emplois, l'un à la scierie et l'autre à la caserne de police, ce dernier contribuant par la promiscuité avec le sordide,  à perturber davantage un caractère déjà ombrageux. Pourtant, il avait à ses côtés la belle et douce Mary. Orphelin de père relativement tôt, Thomas va grandir aux côtés de sa mère et s'appliquer à devenir un bon élève, un garçon sérieux bien qu'un peu taiseux. Pourtant des signes apparaissent, les virées au bistrot local, le Blue Budd, deviennent quotidiennes et de moins en moins maîtrisées c'est-à-dire de plus en plus alcoolisées.  Rien de très inhabituel dans ce patelin paumé de l'Amérique profonde où les hommes (pas tous quand même) prennent régulièrement leurs quartiers dans cet établissement pourtant glauque (William y avait aussi ses habitudes). Non, ce qui est plus inquiétant, c'est la violence profonde, sourde et inexplicable qui semble gronder en lui...
L'intention de l'auteur est de nous convaincre que cette violence était inéluctable, une sorte d'héritage paternel tout autant que la transmission du domaine. Là, je reste un peu dubitative, il manque selon moi quelques éléments pour étayer le propos d'autant plus que les fées n'avaient pas complètement négligé son berceau en lui donnant en plus de l'intelligence, un patrimoine et une mère attentionnée. Le roman est cependant remarquablement servi par une écriture maîtrisée, précise et efficace avec moins d'effets que dans Le cœur du Pélican, ce qui personnellement me convient mieux. Remarquable également, la restitution des ambiances que ce soit celle de la famille où le père est certes méritant mais craint, celle du troquet où suinte la laideur et surtout celle de la bourgade, étouffante à souhait à force de bienveillance compassée mâtinée de commérages grand train, ce dernier aspect pouvant justifier à lui seul la lecture de ce court roman.


2 commentaires:

  1. J'ai l'impression que tu es quand même restée un peu sur ta faim... Non ?

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    1. Peut-être un peu, en effet.
      Comment dire ? Ce n'est pas une question de longueur (je ne lui reproche pas de ne faire que 150 pages), c'est une question d'arguments. Lorsque ses personnages sont animés par la colère, même si c'est très bien écrit, je trouve ça un peu artificiel. Je dis "ses personnages" car j'ai déjà eu cette impression avec Le coeur du Pélican. Ceci dit, j'ai davantage apprécié celui-ci, l'écriture est mieux dosée selon moi.

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