dimanche 8 mars 2015

La grâce des brigands de Véronique Ovaldé



Question de latitude peut-être ? En fixant sa géographie plus précisément que dans ses autres romans où elle était quelque peu flottante et en la fixant plus au Nord,  ce livre d'Ovaldé m'a moins captivée que les autres. Ceci dit, je n'aurais pas cette impression si ce livre était le premier que je découvrais d'elle. J'aimerais pouvoir porter un regard neuf et frais sur une lecture et ne pas l'apprécier ou la déprécier à l'aune de ce qui m' a précédemment enchantée ou déplu du même auteur. Il n'est cependant pas toujours évident de repousser toute porosité entre lectures passées et présentes.
Néanmoins j'ai retrouvé avec bonheur l'écriture d'Ovaldé et le charme a encore opéré. J'aime ses phrases à la ponctuation discrète qui permettent aux mots de s'écouler et de diffuser leur poésie, mine de rien. J'aime les adjectifs qu'elle associe de manière décalée et qui me laissent une impression mélangée d'amusement, de surprise et parfois de nostalgie.
 J'ai retrouvé comme un endroit familier ses personnages un peu "barrés" qui oscillent entre résignation et résilience. Ici, il est question de Maria Cristina qui a réussi à s'extirper de l'étau maternel, à fuir son Canada natal pour "les palmiers cosmétiques" de la Californie. Mais comment s'adapter à la désinvolture et aux paillettes lorsqu'on a été élevé à Lapérouse par une mère dévote à l'excès et paranoïaque qui pense que toute fantaisie est péché ou vulgarité et que tout étranger est suspect ? Peut-être avec l'aide de Joanne, la colocataire qui a tout compris quant à elle du Los Angeles way of life ? Peut-être avec l'aide de Claramunt, écrivain à succès qui vit comme une diva dans son manoir normand ? Charmé par le côté sauvageon de la belle, il devient son amant puis son mentor car la toute jeune femme (elle n'a que 16 ans) aimerait avoir l'avis (et surtout l'aval) de cet homme qu'elle admire sur "La vilaine sœur",  roman cathartique qu'elle vient d'écrire.  Ce couple un peu improbable m'a rappelé celui que forment Lili et Yoïm dans "Les hommes en général me plaisent beaucoup". Même écart d'âge, même différence de corpulence, même côté "je te prends sous mon aile mais fais attention les plumes sont d'airain". Cependant la tension est moindre dans le couple Maria Cristina-Claramunt et là, non, je n'y ai pas cru quand elle règle ses comptes avec lui, c'est le cas de le dire..., lui reprochant dix ans plus tard de s'être fait de l'argent sur son dos alors qu'à aucun moment, elle ne paraît en manquer, vivant dans une opulence bien plus grande que ce qu'elle a connu dans son enfance.Là, j'ai un peu eu le sentiment que l'intrigue bottait en touche car le vrai défi aurait été d'affronter sa mère (bon, ok, ça paraît mission impossible) mais sa sœur surtout (irresponsable au possible vu ce qu'elle a osé confié à leur  mère commune et connaissant très bien son côté peu amène). Les bases pour créer un ressort narratif intéressant étaient donc posées et j'aurais aimé que Véronique Ovaldé explore davantage cette piste plutôt que de nous proposer une fuite, même romancée façon "on the road again" (j'ai mis "again" parce que quand même je n'ose pas comparer à Kerouak). Un livre que j'ai donc davantage aimé pour son écriture que pour son histoire mais comme je venais d'en lire un  mal écrit, mon besoin a été comblé. Ha, la porosité...


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire