vendredi 23 décembre 2016

Une éducation libertine de Jean-Baptiste Del Amo

Mon libraire n’emploie pas les superlatifs à la légère. Alors que je lorgnais du côté des nouveautés et en particulier sur Règne animal de Jean-Baptiste Del Amo, il est allé me dénicher Une éducation libertine du même auteur, me conseillant de commencer par cet ouvrage, « l’un des tout meilleurs qu’il ait lus ».
A l’image d’un roman de type classique, l’incipit joue parfaitement son rôle et nous dévoile le décor du roman, Paris sous le règne de Louis XV, un Paris sale, suintant sous le soleil d’été, le Paris grouillant et affairé du peuple qui cherche abri et pitance. C’est dans cette puanteur décrite avec une richesse de style prodigieuse qu’évolue Gaspard, une jeune homme tout juste débarqué de sa ferme quimpéroise. On devine  (l’auteur s’emploie à distiller les informations tout au long du roman) qu’il s’agit davantage d’une fuite que d’une volonté de tenter sa chance à Paris. Gaspard, presque absent de lui-même, accepte un travail particulièrement ingrat, débarder des grumes transportées par la Seine. Le jeune homme trouve l’aide d’un compagnon de besogne ainsi qu’un logis et survit tant bien que mal. Mais les plongées au cœur du fleuve, de ses eaux nauséabondes semblent raviver chez Gaspard un profond mal-être. Vite, il fuit et trouve un emploi d’apprenti chez un perruquier dont il doit repousser les avances. Gaspard fait alors la rencontre du mystérieux comte Etienne de V. dont la réputation sulfureuse est longuement détaillée par le perruquier, un peu jaloux de l’attirance qu’il a immédiatement décelée entre le libertin et le jeune apprenti. Gaspard est en effet très troublé par cet homme à la séduction magnétique. Il accepte des rendez-vous pour de simples promenades puis grimé en gentilhomme se fait passer pour un ami du comte et évolue parmi la noblesse. Gaspard se prend à espérer. Le comte peut-il l’extraire de sa condition ?
On pense alors que le titre du roman va prendre tout son sens mais en fait, je n’ai pas trouvé qu’il s’agissait vraiment de libertinage. Ce titre suggère la séduction mais aussi la légèreté, la frivolité, une forme de consentement également. Ce n’est pas l’histoire racontée dans ce roman. Il est surtout question ici d’amour, d’amour déçu et de meurtrissures (au sens figuré comme au sens propre). Gaspard est davantage arriviste par dépit que par ambition personnelle. Une seule parcelle d’amour aurait pu le faire renoncer à son ambition.
Nonobstant cette question du titre qui a tout de même son importance car je ne l’aurais pas choisi si le libraire ne me l’avait pas conseillé, ce premier roman (récompensé par le Goncourt du premier roman en 2009) impressionne par la qualité de son vocabulaire, la richesse de son style et par la maîtrise de sa structure narrative.


2 commentaires:

  1. Le contexte me paraît déjà plus attirant que celui du Règne animal. Ceci étant dit, on y retrouve aussi, visiblement, une atmosphère assez lourde et difficile. La qualité du style de cet auteur est toutefois très souvent soulignée...

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    1. Tout à fait, l'atmosphère est tout en tensions dans ce roman.
      Le style est en effet remarquable, presque intimidant.

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