Conditions
idéales pour apprécier La Mémoire de riz
: vieux fauteuil, feu dans l'âtre, ambiance feutrée (en version hivernale ce qui,
à mon sens, lui sied davantage). Que l'on ne se méprenne pas, cette recherche
de quiétude n'est pas là pour amener le lecteur vers une douce torpeur (toutes
ses facultés seront largement sollicitées) mais elle correspond à l'ambiance de
contes que nous donne à savourer Jean-Marie Blas de Roblès au travers de ces
nouvelles. Savourer, en effet, chaque histoire m'a donné la sensation de
déguster une part de gâteau au chocolat fort nourrissant (pour autant, le
propos n'est ni doucereux ni sucré...). Richesse incontestable de la langue
d'abord, phrases ciselées, érudition maitrisée, vocabulaire recherché (des mots presque
oubliés que l'on découvre ou redécouvre avec plaisir) ; fertilité de
l'imaginaire convoqué qui nous éloigne sans conteste d'un quotidien contemporain
pour nous plonger dans un merveilleux (pas toujours joyeux) à temporalité
universelle. Qu'elles soient contées, entre autres, par une antiquaire tactile,
un joueur d'échecs passionné ou un perroquet désabusé, ces 22 nouvelles jouent
sur plusieurs gammes : les illusions et les hallucinations apportent la part de
fantastique et de mystère (impossible à chaque fois de deviner la chute), le
descriptif n'est pas en reste, soutenu par un vocabulaire des plus précis, les
préoccupations des personnages interrogent de grandes questions universelles
voire philosophiques, les lieux nous transportent d'un continent à l'autre, la
temporalité est volontairement brouillée.
Je
ne les ai pas toutes appréciées de manière égale (ou pour être honnête, je ne les
ai pas forcément toutes comprises comme il se doit...), j'ai trouvé que
certaines nouvelles étaient trop sombres mais l'ensemble est, comment dire, relevé,
foisonnant, subtil. Mentions spéciales pour la nouvelle éponyme du recueil, une
vraie petite merveille et pour la dernière, L'Oncle Félix, nouvelle lumineuse, résolument positive malgré l'adversité (le prénom n'est pas choisi par hasard).
J'aurais dû démarrer ma découverte de Jean-Marie Blas
de Roblès avec cet ouvrage (c'est son premier, écrit en 1982). J'aurais ainsi
mieux pris mon élan pour apprécier L'Île
du Point Némo. Ceci dit, son monumental Là où les tigres sont chez eux trône dans ma PAL...
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