vendredi 20 juillet 2018

L'Archipel du Chien de Philippe Claudel

Moi qui apprécie en général les couvertures sobres, je trouve
que celle-ci est des plus réussies. On la doit à Lucille Clerc.
C'est une petite société bien symbolique qui est réunie ce jour là sur une plage de l'île de l'Archipel du chien. Le Maire, le docteur, le curé, deux ouvriers, la Vieille et l'instituteur encerclent trois corps échoués, trois jeunes hommes africains rejetés par la mer. Aucun papier pour leur donner une identité, une existence, alors, dans un pragmatisme froid, le Maire décide de ne rien dire, de les confier au gouffre du volcan. Il impose le silence à tous, arguant que les investisseurs pourraient renoncer au projet des thermes si important pour le devenir de l'île si l’affaire venait à se savoir et de toute façon, "ce-n'est-pas-comme-si-on-était-responsable-de-ce-qui-s'est-passé-n'est-ce-pas" ?
Mais peut-on en toute impunité se détourner à ce point de la misère humaine, celle qui pousse les hommes et femmes à fuir et à s'en remettre à l'arbitraire de passeurs avides ? 
Avec une écriture fluide rehaussée d'un vocabulaire toujours pertinent, Philippe Claudel propose de s'interroger à l'aune d'une micro-société sur de nombreux ressorts humains, individuels ou collectifs, entre lâcheté, résignation, manipulation, violence mais aussi, pour ne pas céder à toute cette noirceur, de ménager une petite voix ténue, discordante qui propose de rétablir vérité et dignité.

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