dimanche 10 janvier 2016

La femme au colt 45 de Marie Redonnet

Souvent c'est un auteur, un livre dont on a entendu parler ou que l'on nous a conseillé, parfois c'est un titre, une couverture qui ont retenu notre attention. Pour choisir La femme au colt 45, je coche l'entrée par la maison d'édition (bon, d'accord, la couverture a joué un peu aussi). La lecture du Caillou de Sigolène Vinson aux éditions du Tripode m'avait fait découvrir non seulement une auteure que je ne connaissais pas mais aussi une écriture originale. Avec ce livre, je découvre une autre auteure (mais mon libraire m'a aussitôt appris qu'elle avait déjà publié) et une écriture somme toute singulière mais je ne chercherai pas à comparer plus avant ces deux lectures, cela n'aurait pas de sens.
Cette femme au colt 45, c'est Lora Sanders, la belle cinquantaine,  douée au tir depuis un apprentissage précoce et actrice au Magic Théâtre. (J'emploie le mot choisi par l'auteure, "actrice" et pourtant il s'agit de théâtre. Naïvement, je pensais que acteur s'employait pour le cinéma et comédien pour le théâtre mais après quelques lectures, il s'avère que cette distinction n'est pas très pertinente, celle que propose Jouvet l'est davantage !)
Savoir utiliser un colt 45 est bien utile a priori quand on vit dans un pays plongé dans une dictature féroce et que l'on cherche à fuir vers l'Etat voisin qui ne s'avèrera pas être le refuge escompté mais tout autant une terre de chaos et de violence. C'est bien utile aussi quand on se retrouve seule. Zuka, le mari et directeur du théâtre a été arrêté car ses pièces ne correspondaient pas à la ligne fixée par la dictature du général Rafi. Le fils Giorgio est entré dans la lutte armée. Lora ne peut donc compter que sur elle-même lorsqu'elle débarque dans la ville de Santaré. Même armée de son colt 45, elle reste une proie facile. L'actrice doit  développer des stratégies de survie, se réinventer chaque jour ou peut-être simplement s'inventer tout court, se donner une consistance propre, sans être modelée par l'influence d'un père violent ou celle d'un mari aimant mais finalement trop enrobant. Qu'a-t-elle saisi de la réalité de la vie, choyée comme une star au sein du Magic Théâtre ? Qu'a-t-elle compris de son pays ? et d'elle-même ? De serveuse de pizzas en passant par libraire, elle retourne finalement au théâtre en prenant soin de se débarrasser des oripeaux de sa carrière précédente.  C'est donc un parcours initiatique, un parcours de libération d'une femme qui entre pourtant dans la maturité que nous propose Marie Redonnet sur à peu près une centaine de pages (ce qui ne permet pas bien sûr tous les développements). En ce qui concerne l'écriture, j'ai trouvé très réussi le rythme donné par les changements de points de vue. L'auteure alterne des passages à la première personne du singulier où Lora s'exprime et se confie avec des passages à la troisième personne où le lecteur la regarde évoluer, obtient des précisions sur ses gestes, son habillement.  Cela fait évidemment penser aux didascalies... de théâtre, allais-je dire mais elles existent aussi au cinéma !
Que la caméra glisse ou que le rideau s'ouvre, peu importe car le plus vaste imaginaire est encore celui du lecteur, me semble-t-il...

3 commentaires:

  1. Je comprends que tu aies craqué sur la couv, elle est très réussie !

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    1. J'ai regardé sur le livre qui en était l'auteur : on la doit à Juliette Maroni. Je suis allée fureter sur son site. C'est une toute jeune graphiste, c'est bien que des maisons d'édition fassent confiance à des jeunes !

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    2. Joli réflexe ! J'irai visiter également son site.

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