dimanche 16 septembre 2018

Mon cœur à l'étroit de Marie NDiaye

Rarement un livre m'aura laissé aussi perplexe. Sa lecture dont je ne saurais dire si elle m'a plu ou pas s'est étalée sur un temps élastique. D'abord lentement, péniblement tant il me mettait moi aussi le cœur à l'étroit, puis à l'abandon pendant de longs mois, attendant que je m'aguerrisse avec des lectures encore plus âpres ou que je sois capable de mettre la distance nécessaire entre lui et moi, je l'ai repris assez avidement, à mon grand étonnement. Mais ce qui n'en finit pas de me laisser perplexe, c'est que ce livre n'a jamais vraiment promis d'être agréable ou facile à lire. Il ne coule pas comme du miel. Sa lecture produit exactement l'effet recherché par son auteur dont le talent n'est plus à démontrer. Dès lors, il me semble que je ne peux pas reprocher à ce livre d'être loyal à son intention. Je trouve même assez courageux de la part de l'auteur de ne pas avoir cherché à écrire un livre plaisant. 
Une lecture, donc, qui perturbe, intrigue et met mal à l'aise. On a du mal à saisir le sens de cette histoire tout en symboles. Nadia et son mari Ange, respectables instituteurs vivant leur métier comme un sacerdoce sont en proie à l'opprobre de toute la ville. Pourquoi un tel acharnement qui tourne à l'agression sur la personne d'Ange ? Ce que perçoit Nadia est-il réalité ou délire paranoïaque ? Rapidement, le couple est confiné dans son appartement bordelais, visité et soigné exclusivement par un voisin qui leur impose sa présence envahissante, les engraissant de mets toujours plus riches. Cependant, dans la succession des faits anormaux qui se produisent, c'est bien Nadia, la narratrice qui est en cause. Elle comprend qu'elle doit partir mais un épais brouillard envahit la ville et modifie tous les repères... Ceux du lecteur le sont également. Vaillamment, il doit tenter d'interpréter les signaux placés ici et là comme des fanaux dans l'étrangeté d'un texte rédigé d'une plume habile, façonnée au ciseau. Une lecture exigeante, sans confort, sans douceur, mais qui sait donner du grain à moudre, un  matériau pour réfléchir et ressentir. 

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