mardi 16 février 2016

Sur une majeure partie de la France de Franck Courtès

Un titre à la consonance météorologique qui n'est pas sans rappeler des préoccupations paysannes. Il est vrai que ce nouveau roman de Franck Courtès s'ancre dans la ruralité. Adulte, l'auteur revient pour une journée champêtre en famille dans ce village de Seine et Marne qu'il a beaucoup fréquenté étant enfant car ses parents y possédaient une résidence secondaire. Il apprend assez fortuitement que l'un de ses anciens compagnons de jeux a fait plusieurs années de prison ce dont il s'étonne car le garçon était plutôt, dans son souvenir, du genre doux et sans histoires. Le roman se propose alors de comprendre ce qui a amené cette situation. Un brave gars ce Quentin, courageux, ayant appris à surmonter ses faiblesses, sensible, intelligent, tout du bon copain et qui de plus, partage avec Franck cet amour profond de la nature, de la forêt, sans chercher un ailleurs, plus urbain s'entend, qui lui conviendrait mieux. Rien à voir avec  Gary, teigneux et violent qui gravite lui-aussi dans cette campagne qui perd progressivement sa part de ruralité profonde. Au-delà d'une opposition classique de portraits dans laquelle s'invitent des personnages annexes comme le frère influençable, la petite amie insatisfaite et Tikiti, l'aide garde-chasse (mention spéciale pour ce personnage tout en poésie malgré ou grâce à son côté un peu frustre), Franck Courtès porte un regard tantôt nostalgique, tantôt accusateur sur la mutation de ces paysages gagnés par la périurbanisation et l'évolution des pratiques agricoles ayant cédé au productivisme. Est-ce un regard d'enfant qui a vu son terrain de jeux du week end dénaturé ? Est-ce la réflexion d'un citadin qui attend une lecture claire des paysages, soit la ville soit la campagne mais pas cet entre deux qui brouille des repères_à chaque espace, sa fonction_ rassurants car posés depuis l'enfance ? Il sait d'avance qu'on lui opposera, tel un puching-ball, l'un comme l'autre, que sa légitimité de Parisien à revendiquer une nature immuable se coincera quelque part, elle aussi, dans cet entre deux.
On peut certes avoir une autre lecture, un regard moins réprobateur sur l'évolution de ces paysages mais il me semble que le grand mérite de ce roman est de s'intéresser à la campagne pour elle-même, d'en faire un personnage principal et non pas seulement un cadre comme dans les romans de terroir ce qui reste assez rare pour être signalé.



3 commentaires:

  1. La thématique n'est pas dénuée d'intérêt. En ferais-tu une lecture "prioritaire" ?

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    1. Comment dire ? J'en ai fait une lecture prioritaire car ma librairie l'a déjà invité et va l'inviter à nouveau...
      Tout dépend...Qu'as-tu d'autre dans ta PAL Delphine ? au sommet de ta PAL, je veux dire ?

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    2. En fait, je n'ai pas vraiment de PAL, elle ne dépasse pas deux ou trois livres. Je lis au gré de mes envies, découvertes... et des coups de coeur des copines !
      Là je viens de terminer le merveilleux Il est avantageux d'avoir où aller de Carrère, et il m'est un peu difficile de passer à autre chose tant ce livre est riche et lumineux. J'ai acheté un Norvégien et un Italien, et réservé un Grec à la bibliothèque. Après, c'est ouvert... à moins que d'autres envies surgissent d'ici-là ;-)

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